Impressions de salons
Certains vous diront que le salon est un art difficile, d'autres que l'auteur n'est vraiment pas fait pour ça !
Les avis divergent suivant la facilité de l'écrivain à aborder le chaland. Ce week-end, à Saint-Quentin, j'ai encore une fois fait de belles rencontres et donné envie à des inconnus de lire mon livre.
Entourée d'auteurs blasés et un peu misanthropes sur les bords, j'ai passé deux jours coupée du monde. Le salon est en effet un espace temps bien différent. La guerre peut éclater à l'extérieur, seuls les écrivains continueraient à signer derrière leur petit stand, loin de l'agitation générale !
Certains se planquent derrière leurs piles de livres en ronchonnant qu'ils ne sont pas là pour vendre des tranches de culture au poids. D'autres passent leur journée à lire le roman du voisin. La plupart tentent un ou deux sourires aux visiteurs et préfèrent discuter entre eux, l'occasion de rencontrer les "collègues" comme ils disent... Un salon est un peu comme une colonie de vacances d'auteurs qui se retrouvent pour papoter secrets de fabrication et s'échanger leurs livres en se lançant quelques fleurs au passage...
Un monde étonnant ! De nombreux écrivains viennent encore à la rencontre de leur public avec simplicité et gentillesse. Ce week end, il y avait quelques têtes d'affiche évidemment, Jean-Claude Carrière et Didier Daeninckx, charmants... Des stands où les gens se bousculent avec timidité et déférence. Guillaume de Fonclare aussi, porté par un prix au salon de Paris et par des critiques nationales a été le point de rendez-vous de nombreux lecteurs.
Mais quand on est une inconnue, personne ne s'arrête sur votre stand. Les visages s'enchaînent impassibles. Certains fixent votre nom, d'autres votre livre, en fouillant leur mémoire pour se dire "on ne la connaît pas celle-là". Certains regards vous fuient quand vous lancez un "Bonjour" entraînant. Mais si vous arrivez à capter un sourire et quelques minutes de l'attention d'un visiteur, c'est gagné.
Quand personne ne vous connaît, réussir à raconter un peu son livre et ses personnages est un petit exploit à chaque fois. Un défi que je me lance pour ne pas rester à m'ennuyer sur ma chaise et devenir aigrie comme quelques voisins de table... Et quand on ose aller vers les gens, ils vous apportent toujours de petits moments de bonheurs. L'une raconte qu'elle vient de retrouver une soeur allemande, l'autre vous explique pourquoi elle ne croit plus au hasard, certains vous parlent du dernier livre qu'ils ont lu.
Peut-être ai-je encore l'excitation de la jeunesse, mais je ne me considère pas comme un marchand de tapis en allant sur des salons. Même si c'est difficile et usant, c'est le seul moyen pour moi d'aller à la rencontre des lecteurs. De partager, d'échanger, de me nourrir... J'ai peut-être cette facilité de contact que d'autres écrivains n'ont pas. Cela fait bien longtemps que j'ai mis ma timidité au fond d'un placard, ce qui m'aide à aborder les passants qui me dévisagent d'un air intrigué. C'est vrai... Mais sur les salons, j'apprends aussi chaque jour l'humilité, la patience et la ténacité. Une belle petite leçon pour un écrivain, non ?